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Le But de Dieu et la Voie de Dieu

par T. Austin-Sparks

Publié pour la première fois dans le magazine « A Witness and A Testimony » Jan-Fév 1944, Vol 22-1. Source : « God's End and God's Way ». (Traduit par Didier Lebeau)

"Nous ayant fait connaître le mystère de sa volonté selon son bon plaisir, qu'il s'est proposé en lui-même pour l'administration de la plénitude des temps, savoir de réunir en un toutes choses dans le Christ, les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre en lui, en qui nous avons aussi été faits héritiers, ayant été prédestinés selon le propos de celui qui opère toutes choses selon le conseil de sa volonté... Et il a assujetti toutes choses sous ses pieds, et l'a donné pour être chef sur toutes choses à l'assemblée." Éphésiens 1 : 9-11 et 22.

Il y a dans la déclaration de ce passage trois parties principales :

1) La volonté et le dessein éternels de Dieu.

2) Christ, le centre de ce dessein.

3) L'Eglise, qui est Son Corps, l'instrument pour la pleine expression de ce dessein – c'est-à-dire de Christ.

Il nous est dit que Dieu prit une décision dans les conseils éternels. En esquissant et en arrêtant Ses intentions de créer et de constituer « toutes choses » « dans les cieux et sur la terre » Ephésiens 1 : 10. Il était poussé et gouverné par un dessein spécial et défini. Ce « dessein » est mentionné plusieurs fois dans le Nou­veau Testament, et il nous est montré que différentes choses y ont reliées. Il est des plus important que nous reconnaissions le fait que le dessein de Dieu est un, bien qu'il y ait plusieurs phases dans l'activité divine. Rien n'est une fin en soi. La première loi de la plénitude spirituelle (et remarquons que la plénitude est précisément ce qui est en vue), c'est de saisir le fait et la nature de ce dessein de Dieu, qui gouverne tout. II est impressionnant et douloureux de reconnaître que, dans les choses qui sont associées ici-bas au Seigneur, il y en a si peu, si peu, qui soient réellement mar­quées par la plénitude spirituelle. Médiocrité, faiblesse, limitation, pauvreté, défaite, ignorance, immaturité et désappointement caractérisent un si grand nombre d'enfants de Dieu et une si grande part de l'œuvre de Dieu. C’est une des choses qui causent tant de détresse, de recherche, et d'efforts dans certains milieux.

N'en trouverait-on pas l'explication dans le fait que rien de ce qui n'est qu'une part d'un tout ne peut atteindre ni réaliser le dessein tout entier ? Pour être dans la voie de la plénitude, il est essentiel, en premier lieu, de recon­naître et de réaliser le fait que Dieu n'est pas simple­ment engagé dans un grand nombre d'activités bonnes et bienfaisantes, mais qu'Il est toujours et uniquement occupé par un dessein qui embrasse tout, et auquel tout est lié! « Dieu opère TOUTES CHOSES selon le conseil de sa volonté » Ephésiens 1 : 11. La mesure de la valeur suprême de notre travail correspondra à la compréhension initiale que nous aurons eue d'un dessein seul et unique. Lorsque cela sera établi, nous arriverons bientôt à voir ce qu'est le dessein, et comment et par quels moyens il sera réalisé. Lorsqu'un maître a un seul et unique plan, auquel il se consacre, il demandera d" tous ceux qui travaillent pour lui, qu'ils ne se contentent pas de faire différentes choses, si bonnes soient-elles et constituant même une part de son œuvre entière, mais qu'ils voient, au delà de leur petite part et de leur propre tâche, le but et l'objet tout entier, afin d'agir positivement en le gardant en vue. Il sera favorable à ceux qui viendront travailler pour lui et aux moyens qu’ils emploieront, dans la mesure où ils auront à cœur le but tout entier. La mesure de ses ressources et de sa plénitude leur sera accordée sur cette seule base. Il en est de même pour Dieu. Mais comprenons bien que c'est la plénitude spirituelle qui est en vue, et non la gratification personnelle.

Ensuite, le dessein est de rassembler toutes choses en Christ. C'est une Personne pleine et entière, agran­die, et embrassant tout. La grandeur, la magnificence, la plénitude universelle de Christ, voilà le but de Dieu. Il n'est pas suffisant pour nous de voir le dessein, si fondamental cela soit-iI, il faut que nous voyons, de manière toujours grandissante, la plénitude de Christ. Il doit y avoir une vision initiale de cette grandeur, de cette majesté, de cette gloire, de cette universalité. C'est à une telle vision que sont dues la puissance, l'efficacité et la gloire de l'Eglise des premiers jours. Telle fut la signification de la « Pentecôte ». C'est une vision comme celle-là qui fit des apôtres les hommes qu'ils furent. Paul devait tout à la révé­lation que Dieu lui donna de Son Fils en lui. Mais cette vision doit se continuer. Elle doit devenir de plus en plus importante. Nous ne devons pas simplement nous fixer à quelque expérience passée la vision que nous avons aujourd’hui de Christ. La volonté du Seigneur, c'est que nous vivions et marchions par l'Esprit à un tel point, que nous pouvons dire que la vision que nous avons de Christ aujourd'hui est infiniment plus grande et plus merveil­leuse qu'elle ne l'a jamais été. Cela est en ligne avec le dessein de Dieu, et il en est ainsi pour tous ceux qui sont réellement entrés dans une compréhension spirituelle de ce dessein.

Nous arrivons, en troisième lieu, à considérer la méthode et les moyens dont Dieu se sert pour l'accom­plissement de Son dessein éternel. C’est « l'église, qui est son corps » (le corps de Christ). La Parole de Dieu nous déclare définitivement que l'Eglise est « la plénitude de Celui qui remplit tout en tous ». Cette plénitude universelle de Christ doit être révélée et exprimée dans et par un instrument appelé l'Eglise. Qu'est-ce que cette Eglise?

Il nous est dit premièrement qu'elle est une com­pagnie d'élus. Laissant de côté toutes les théories sur l'élection, contentons-nous, pour le moment, de voir que Dieu a voulu, de toute éternité, avoir une telle compagnie, et que l'élection a rapport au dessein, et non pas, principalement au salut. Dieu connaît, il ne peut en être autrement, les réactions suprêmes des hommes à l'égard de l'offre qu'Il leur fait, et c'est selon Sa pré-connaissance qu' Il a prédestiné à Son dessein. Mais Dieu n'a jamais dit à une personne non sauvée qu'elle est prédestinée à l'être. Dieu appelle simplement. L'Eglise est la compagnie des appelés qui ont obéi.

Deuxièmement, l'Eglise est quelque chose de plus grand que les églises. Selon ce que nous entendons par celles-ci, l'Eglise peul se trouver en elles toutes, ou bien elle peut ne pas être du tout dans beaucoup d'entre elles. L'Eglise est essentiellement une chose spirituelle ; elle n'est ni sectaire, ni dénominationale, ni « ecclésias­tique », ni traditionnelle. Elle est l'union spirituelle des membres d'un organisme vivant, un corps possé­dant une vie; elle est une entité, elle est « tous un en Christ ». La mesure de lumière que nous avons ne nous rend pas plus ou moins membres de ce Corps, bien qu'elle puisse en affecter le fonctionnement. Ce n'est pas notre compréhension de « la vérité quant à l'Eglise » qui nous constitue membres de l'Eglise, bien qu'elle affecte grandement la question de la plé­nitude. Ce qui est la base de l'actualité du Corps, c'est une relation vitale avec Christ.

Mais cela dit, il nous faut montrer combien il est essentiel de reconnaître ce qu'est l'Eglise. Accom­pagnant une révélation personnelle de Christ dans Sa grandeur, la révélation de l'Eglise est liée à notre avance pratique vers la plénitude. Paul a, dans ses écrits, une plénitude beaucoup plus grande que n’importe quel autre apôtre, et cela est dû principalement à la révélation spéciale de l'Eglise qui lui avait été donnée. Ce qui res­sort de cette révélation, c'est que Christ et l'Eglise sont UN, comme la Tête et les membres d'un même corps.

Il y a deux ou trois choses dans cette question qu'il nous est nécessaire de saisir. Il y a premièrement le fait, établi si clairement et si pleinement dans les Ecritures, que Dieu a tout aussi définitivement choisi et désigné l'Eglise pour la réalisation de Son dessein éternel, qu' Il avait choisi et désigné Son Fils. Dieu s'est lié Lui-même et Sa plénitude autant à Son Fils qu’à l’Eglise. Tandis que l'Eglise est soumise au Fils, qu'elle en est l'organe et l'instru­ment, comme la femme l'est à l' égard de son mari (Ephésiens 5 : 22-24), ils sont un, en ce qui concerne le dessein. Ce fait entraîne en soi la jalousie de Dieu pour Son Eglise, et signifie que, pour arriver à la plénitude, l'on ne peut ni l'ignorer, ni l'amoindrir, ni l'outrager.

De plus, en ce qui concerne la plénitude spirituelle, Dieu continuera à agir strictement par le moyen du Corps, c'est-à-dire qu'il n'est pas possible pour des individus séparés, de connaître la plénitude. La plénitude est une question relationnelle. « L'Eglise est la plé­nitude de Christ ». Aucun individu ne peut l’être. C'est pourquoi l'union spirituelle, la relation des membres, la communion, la mutualité et la dépendance des uns à l'égard des autres, sont fondamentales et indispensables pour parvenir à la maturité spirituelle. « Jusqu'à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, l'état d'homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude de Christ » Ephésiens 4 : 13.

Dans l'Ancien Testament, lorsque les chose, eurent été constituées selon le modèle divin, c'est de la Tente d'Assignation que Dieu parlait au peuple. Il en est ainsi dans le Nouveau Testament. Avant d'obtenIr la réponse à la demande qu'il fit sur la route de Damas, Paul dut entrer dans la ville, et ce fut par le moyen de l'Eglise qu’il la reçut. Avant d'entreprendre la grande œuvre de sa vie, l'apôtre dut demeurer dans l'Eglise d'Antioche pour y recevoir la confirmation de sa mission (Actes 13). Tout cela ne signifie pas que Dieu n'ait jamais agi souverainement et dans Sa grâce à l'égard de ceux qui avaient à cœur Ses intérêts sans reconnaître cependant celte loi; mais nous parlons de plénitude spirituelle, et c'est à cela que nous appelle notre ministère. Ce n'est pas un « Comité général », « exécutif », où « conseiller », mais le Corps, dans sa représentation et son fonctionnement spirituels, qui est la voie voulue de Dieu.

Il nous faudrait plus de place que nous n'en avons à notre disposition, pour montrer toutes les valeurs et les implications renfermées dans une compréhension adéquate de la place et du dessein que Dieu a pour Son Eglise en toutes choses. C'est précisément l'une des questions qui a eu une place considérable dans notre ministère parlé ou écrit durant ces dernières années.

Ceci nous amène aux églises, c'est-à-dire aux assem­blées locales du peuple de Dieu. Les temps et les condi­tions ont grandement changé depuis les jours du Nou­veau Testament, tout au moins en ce qui concerne le monde occidental. Il était simple et naturel, en ces temps-là, de rassembler ceux 'lui croyaient en Christ. Il n'y avait alors que des croyants et des non-croyants. Aujourd'hui s'élèvent quantité d'autres questions, celle des « affiliations », « organisation », « pratiques », « croyances » etc. Mais il y a une ou deux choses qui doivent toujours gouverner cette question; ce sont :

1 - L'église ou l'assemblée locale doit être localement tout ce que l'Eglise est universellement, dans son ensemble. Elle ne doit être plus petite, ni dans sa vision, ni dans sa vocation, ni dans sa relation. Bien que située localement, elle est universelle quant à sa nature, à son influence, à sa vocation et à sa fonction. Si elle vit pour elle-même, elle mourra. La plénitude dépend de sa longueur et de sa largeur, de sa hauteur et de sa pro­fondeur spirituelles.

2 - L'église locale est l’environnement d'éducation spirituelle, en vue de l’utilité pour le Seigneur. C'est là que sont apprises toutes Ies leçons essentielles, non seulement par l'enseignement mais aussi par la discipline spirituelle. La leçon fondamentale de la soumission au Seigneur – qui a une si grande importance dans la question de la croissance spiri­tuelle – est apprise de manière très pratique dans une assemblée fidèle et dans la vie de communion. Toute vie indépendante, non relationnelle et simplement personnelle, est simplement impossible lorsque le Corps est véritablement reconnu.

La protection, le support, l'appui et le soutien spiri­tuels du peuple de Dieu, au delà d’une manière simplement générale, ont une valeur et une importance très importantes. L'église locale, loin de n'être qu'une « congrégation », doit être une expression locale de la famille de Dieu, et remplir toutes les fonctions et pourvoir à toutes les valeurs de la vraie vie et des vraies relations de famille

3 - La question qui a une importance prééminente, dans l'église locale comme dans l'Eglise universelle, c’est celle de la souveraineté absolue de ChrIst, la Tête. Tout ce gui usurpe Sa place ou qui est en conflit, d'une manière ou l'autre, avec elle, aboutira très certainement à une limitation spirituelle et à un retard proportionné de la croissance. N'est-ce pas pour cette raison que, dans les églises du Nouveau Testament, aucun homme l'exerçait l'autorité. Mais que des anciens, et non pas un ancien, étaient désignés. Le principe du Corps est sauvegardé dans ce qui est corporatif, et l’autorité individuelle évitée. A Antioche, le Saint Esprit parla à une compagnie de représentants qui se trouvaient avoir ensemble une responsabilité spirituelle. Les anciens sont la représentatifs, il s’agit de la mesure spirituelle et non ecclésiastique. La pluralité des anciens, dans le Nouveau Testament, signifie que l'église est amenée, en et par ses repré­sentants, sous la complète souveraineté de Christ, par le moyen du Saint Esprit.

4 - Il nous faut remarquer ensuite que les apôtres ne partirent jamais en ayant le projet de fonder des églises. C'était là le résultat spontané et inévitable de I'œuvre du Saint Esprit dans chaque lieu. Christ était prêché et accepté, et la relation des croyants suivait spontanément (voyez Actes 2 : 42). Ce qui déter­mine les églises, c'est Christ. Ceci est la solution à beaucoup de problèmes et la réponse à beaucoup de questions qui se posent, tout spécialement dans notre monde occidental, en ces temps particulièrement compliqués. Quel doit être le principe directeur et décisif qui nous pousse a nous rassembler? Ce doit être Christ! C'est sur cette base seule que nous nous réunissons là où le but de Dieu est le plus pleinement en vue, et là où se trouve ce qui contribue le plus à atteindre ce but – la plénitude de Christ – c'est cela qui décidera de la place où nous devons être, et per­sonne ne devrait discuter cela. C'est à cause de notre dévotion et de notre jalousie pour une « chose » une « Mission », une « Dénomination », une « Tradition », une « Communauté », un « Mouvement » etc. que jaillissent Ies rivalités et les mauvais sentiments. Tout ce que l'on entend dire au sujet' de « brebis volées », et d'enfants de Dieu divisés , vient en grande partie d'un souci pour – non pas la croissance spirituelle –­ mais pour quelque chose ici-bas, sur cette terre. Combien ces choses deviendraient impossibles si chacun prenait cette attitude à l'égard des choses: peu importe ce qui survit ou cesse d'exister, pourvu qu'il y ait spiri­tuellement un accroissement de Christ. Cela entraîne la nécessité, pour tout le peuple de Seigneur, et parti­culièrement pour ceux qui ont des positions « offi­cielles » et des places d'influence, d'être uniquement et absolument consacré a l'accroissement de Christ, Christ n'est pas divisé; c'est donc Christ qui est la base de l'unité, et non les choses mentionnées plus haut.

A qui sont les brebis? Sont-elles à vous? Une brebis de Christ peut-elle lui être volée par ceux qui lui sont consacrés ? Si ce sont les brebis de quelqu'un ou de quelque chose, nous sommes dans un autre domaine. Non! Toutes choses de ce genre sont des causes de faiblesse et de petitesse spirituelles, et il est nécessaire d'avoir une altitude nouvelle à l’égard de Christ Lui-même pour arriver à la plénitude.

Nous dirons encore, à cet égard et pour le moment, que tout ce qui est donné par le Seigneur doit contri­buer à « l'édification du Corps » de façon directe et positive. C'est ce qui en marque l'objet et la direction, et c'est là sa loi caractéristique. L'évangélisation, l'enseignement, les dons personnel, et spirituels, tout doit définitive­ment avoir ce but d’édification en vue. L'évangéliste et l'évangéli­sation ne sont pas une fin en soi, ni quelque chose à part. Le Nouveau Testament renverse complètement une idée ou une procédure de ce genre. Toutes ces fonctions sont des fonctions du Corps, et elles doivent être maintenues ensemble pour que le Corps soit bien équilibré; aucune ne doit être accentuée au détriment des autres ni laissée de côté. Un ministère d'enseignement doit marcher de pair avec un ministère d'évangélisation et vice versa. Chacun de ceux qui fonctionnent comme membres du Corps de Christ – ­et tous les membres devraient fonctionner – devrait avoir en vue, non pas le salut des âme, ou l'instruction des saints, mais par leur moyen et tous les autres, l'accroissement de Christ. Rappelons-nous que l'Eglise n'est ni grande ni petite, que le succès de notre travail n'est pas mesuré selon le nombre de personne, repré­sentées, mais selon la mesure positive de Christ.

Je ne saurais terminer ce traité sans rappeler briève­ment une ou deux questions, qui sont fondamentale pour ce ministère.

Il y a la question de la Croix. Ce ne sera pas dire quelque chose de nouveau ou d'extraordinaire que de rappeler que la Croix de Christ est profondément liée à la question de la plénitude divine. Mais il est nécessaire d'affirmer continuellement ce fait, et d'en avoir une révélation toujours grandissante. Les Ecri­tures nous montrent très clairement que, jusqu'à la fin, I’Adversaire cherchera de toute sa force et par tous les moyens, à soulever la question de notre acceptation et de notre position en Christ. Il est désigné, à la lin des temps (Apocalypse 12) comme étant « I’accusateur de nos frères », et l’un de ses efforts les plus déterminés a pour but la destruction de notre assurance. Tout ce qui porte en soi l'idée que nous faisons ou que nous devenons quelque chose qui mérite la grâce de Dieu et obtient Son acceptation, porte le sceau du Diable Iui-même. La mort de Christ pour nous, et notre mort avec Lui, est la seule, mais sûre base de notre entière accep­tation. Luther le dit si pleinement lorsqu'il s'écrie : « O Christ, je suis Ton péché, Ta malédiction, Ta colère de Dieu, Ton enfer et au contraire, Tu es ma justice, ma bénédiction, ma vie, ma grâce de Dieu, mon ciel. » II ne faut pas s'étonner que le Diable ait haï Martin Luther, et qu'il I’ait assailli si cruellement.

Mais il n'y a pas seulement la valeur fondamentale, initiale et parfaite de la Croix pour notre acceptation entière et incontestable; il y a une signification de la Croix qui est en relation avec la plénitude spirituelle et le fruit spirituel. C'est ce que Paul appelle « être rendu conforme à sa mort » Philip­piens 3 : 10.

Ceci, répétons-Ie, doit être gardé à part de notre justification et de notre accès auprès de Dieu. Combien de tragédies, de scandales, de défaites, de faiblesses, de mort, de limitation et d’égoïsme que nous ren­controns chez beaucoup de chrétiens et dans beaucoup d'institutions, de communautés et d'églises chrétiennes, sont dues à la « chair » non crucifiée ou à la vie natu­relle ! A quel point Christ est mis hors de vue par les hommes, les choses et les méthodes qui se mettent en proéminence! II faut, pour qu'Il arrive à la place qui Lui est donnée dans l'intention divine, et à nous avec Lui, que l'œuvre de Ia Croix se fasse continuellement et de plus en plus profondément en nous. Il nous faut réellement être en état de dire: « Je suis crucifié avec Christ ». Oui, mais aussi d'achever Ia déclaration: « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Est-ce vrai? « Je ne vis plus moi »? Plus moi ? C'est bien ce que Paul entendait, mais qui peut connaître Ia pro­fondeur de ce « moi » ! Christ seul sait combien entière et profonde est l'œuvre de Sa Croix, et nous ne pouvons que nous abandonner pleinement à Lui, pour que le Saint-Esprit accomplisse en nous toute Sa pensée, en ce qui concerne Ia Croix, afin que la voie soit libre pour Sa plénitude.

Ainsi le double aspect et le double message de Ia Croix ont une très grande part dans ce ministère. Il y a beaucoup d'enfants de Dieu qui n'aiment pas ce der­nier aspect que nous venons de mentionner, et qui le refusent. Nous dirons seulement que, s'ils représentent plus qu'une moyenne en richesse spirituelle et dans leur connaissance de Christ, et que si ce à quoi ils sont liés est affranchi des résultats ordinaires de la force de la vie naturelle, il y a quelque chose dans leur antago­nisme contre l'aspect subjectif de la Croix à quoi nous devrons nous soumettre. Mais nous avons été là nous-mêmes, et nous connaissons maintenant la diffé­rence.

Il nous faut terminer; nous le faisons en touchant à une autre question. Il y a beaucoup d’enfants de Dieu qui pourront accepter une grande partie de ce que nous venons d'écrire, mais qui réagiront en déclarant que c'est « idéaliste », que c'est trop élevé, que ce n'est pas possible, que, les choses étant ce qu'elles sont main­tenant, nous ne pouvons pas espérer un tel retour à la Parole de Dieu. Il n'y a qu'une seule réponse à cette attitude. La Bible a toujours reconnu une position comme celle-là, et elle y a pourvu. Il n'y eut qu'un petit nombre d'hommes qui, du sein de la nation d'Israël captive, retournèrent volontairement pour recons­truire la ville, la muraille, la maison à Jérusalem; et la parole qui les gouvernait et les caractérisait était : « Que celui qui a un cœur bien disposé, que son Dieu soit avec lui ».

Il est clair, que dans le livre de l'Apocalypse, la majo­rité avait abandonné Ia pensée entière du Seigneur. L'appel que nous y trouvons s’adresse à ceux qui ont une oreille pour entendre. Nous voyons qu’il sont appelés les « vainqueurs »; et cela est nettement en relation avec les conditions décadentes; c'est une réaction vers la pensée entière et originelle du Seigneur. L'on peut difficilement s'attendre à ce que tous les chrétiens répondent à l'appel et à Ia mesure de Dieu, mais il est clair qu'il, le peuvent, que le Seigneur le veut, et que ce qu' Il veut n'est pas hors de d’atteinte. Ce peut être un chemin coûteux; et le prix en sera surtout amer à cause de l'attitude des autres chrétiens.

C'est pourquoi nous réalisons que ce ministère passera au cri­bIe le peuple de Dieu, et que ceux-là seuls qui veulent réellement marcher avec le Seigneur, et qui « tendent à ce qui est parfait », lui feront place. Notre message doit donc toucher les vainqueurs, bien que nous ne les regardions pas comme des élus d'entre les élus, comme une aristocratie spirituelle choisie. Ils auront une place d'honneur spéciale, parce que le Seigneur aura en eux ce à quoi Il a mis Son cœur dès le com­mencement. La différence à la fin sera celle que nous voyons entre Joseph et ses frères.

Un ministère comme celui dont nous venons de parler sera le résultat de Son action profonde et sévère à notre égard. Ce n'est pas quelque chose que l'on puisse étudier et obtenir mentalement. Nous ne sor­tirons jamais du tour du potier comme un vase ter­miné; mais, d'une manière ou de l'autre, le Seigneur associera le façonnage et l'usage. Sans aucun doute c'est ce qui devrait être fait.

«Le messager du Seigneur dans le message du Seigneur » ; nous avons ici ce principe fondamental, que l’ins­trument n'est jamais en avance sur son histoire spiri­tuelle. Les prophètes eux-mêmes, qui parlaient des choses à venir et de beaucoup de choses dont le sens ne leur était pas entièrement clair, étaient amenés à avoir leur ministère incrusté en eux par l'expérience pratique. Mais l'action sévère de Dieu a toujours en vue l'accroissement et le progrès. Un tel ministère ne peut être ni « entrepris » ni adopté. Nous ne pouvons pas y entrer comme nous entrons dans un travail quelconque, par un entraînement technique ou une de part une préparation intellectuelle. C'est en vérité quelque chose en présence de quoi nous reculons naturellement, comme Moïse, Jérémie et d'autres. Il est utile et inté­ressant, ou bien cela peut nous éclairer, de remarquer que, lorsque, par le moyen de Jérémie, le Seigneur parle à Israël du potier et de la maison du potier, Il prend Lui-même la place du potier; le moulage, la forme, le redressement, l'ajustement, la purifica­tion du vase en vue de Son utilité, se font au moyen des assauts et des châtiments dus à l'activité de l'ennemi. Il y avait un rapport entre Ies mains du Potier et l'opposition d'un souverain étranger faisant le siège de la ville. Ainsi, pour que nous ayons une utilité plus entière, le Seigneur se sert de l' ennemi et de son œuvre, et nous ne sommes jamais libérés de sa pression pour un temps prolongé.

Telles sont donc les choses principales auxquelles nous avons été appelés et auxquelles nous nous sommes abandonnées. « Nous voici, nous ne pouvons faire autrement. Que Dieu nous aide ! »

Que le Seigneur nous donne à tous un cœur prêt à « suivre l’Agneau où qu’il aille », et à parvenir à Sa plénitude.

Tiré du magazine « A Witness & A Testimony » Janvier 1944.


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